Pour survivre, un enfant doit développer un lien d’attachement avec ses parents ou autres adultes qui s’occupent de lui. C’est une exigence de la nature humaine.
Pour grandir avec tout son potentiel (sans anxiété, sans dépendance, sans agressivité), l’enfant a besoin de se lier en toute espérance. C’est fondamental pour la création d’un lien d’attachement sécurisant.
Pour ce, il est nécessaire qu’il se sente en sécurité (Protection), qu’il se sente vu et compris (Attention) et qu’il se sente apaisé (Réconfort). Protection, Attention, Réconfort sont des ingrédients relationnels essentiels pour que naisse la Confiance. Les premières lettres de ces mots forment l’acronyme PARC*
Aujourd’hui, j’aborde l’Attention. Le billet de décembre portait sur la Protection et les billets suivants vont traiter des 2 autres aspects.
L’attention est un besoin. Il est donc essentiel d’y répondre. Comme vous savez, un besoin non-répondu crée une tension, un stress, alors qu’un besoin répondu crée du bien-être. Mais qu’est-ce que cela signifie « prêter attention »?
Voir vraiment son enfant correspond à 3 attitudes : 1) être en harmonie avec son état psychique, lui montrer que l’on sent ce qu’il ressent; 2) appréhender sa vie intérieure grâce à l’imagination et au désir de le connaître; 3) réagir de manière adaptée c’est-à-dire en concordance et au bon moment.
Regarder son enfant pour de vrai amène l’adulte à dépasser ses comportements pour voir quel est l’état d’esprit derrière ses actes ou ce qui se passe en lui. Par exemple, un enfant de 4 ans fait une crise parce que vous avez vidé l’eau de son bain. Vous pouvez alors sortir les raisons logiques pour lui faire comprendre et bien évidemment, il continue à tempêter. Vous avez vos intentions et l’enfant a les siennes. Il se peut que l’eau de la baignoire représente pour lui une mer avec un bateau et des marins. Et vous les avez fait disparaître, quelle horreur!
L’adulte attentionné a une vision intérieure. Il voit l’esprit de son enfant, ce qui se passe dans sa tête et il est sensible aux émotions. Dans la situation ci-haut, ne pouvant faire réapparaître les marins, l’adulte peut montrer qu’il entend sa colère ou sa peine. Il lui laisse le temps de vivre l’émotion tout en étant là. L’enfant se sent vu, compris et reconnu. Il développe ainsi sa sécurité affective (un attachement sécurisant) et son empathie.
En ayant une vision intérieure, l’adulte s’éloigne des étiquettes, des comparaisons, voire des diagnostics. En effet, les qualificatifs brouillent notre attention et souvent enferment les enfants dans des catégories. L’enfant a besoin d’être vu, tel qu’il est et non à travers des filtres personnels ou sociaux.
Pour voir clairement son enfant, l’adulte doit également connaître son propre état d’esprit (ses suppositions, ses désirs, ses émotions). L’adulte, qui prend le temps de visiter régulièrement son paysage intérieur, se fabrique de bonnes dispositions pour être en phase avec l’état psychique de son enfant et découvrir et admirer le paysage intérieur de celui-ci.
Une autre clef pour voir véritablement son enfant est la curiosité. Cette émotion « joyeuse » permet d’aller au-delà des apparences. Elle nous oriente vers la découverte et nous fait emprunter des chemins inconnus. Des recherches en sciences cognitives ont montré qu’une grande partie des actes des bébés et des jeunes enfants relève de leur besoin d’exploration et d’apprentissage.
C’est leur appétence qui les pousse à expérimenter. Se laisser « mener » par la curiosité est une autre manière d’être en phase. De plus, cette émotion installe en nous des habiletés pour l’observation. Il n’y a pas de jugement ni d’évaluation. Observer en regardant avec le cœur et écouter tout simplement.
Accepter son enfant dans tout son être, c’est l’accompagner dans ce qu’il vit, à sa manière à lui. C’est être présent pleinement, le soutenir dans ses expériences et l’encourager (le respect des efforts fournis). Il se sent alors vu et compris. Il se sent lui et il s’apprécie. Son attachement dans la sécurité se consolide.
Malheureusement, il arrive que des adultes utilisent la honte pour montrer leur « attention », pour « éduquer ». Il peut faire honte directement par des expressions de rejet qui, venant avec la colère, conduisent à l’humiliation. Un exemple : « Les grands garçons ne pleurent pas quand ils n’ont pas ce qu’ils veulent ». L’adulte peut aussi faire honte indirectement, notamment, quand l’enfant est chaviré et qu’il n’est pas en phase avec sa réaction émotionnelle.
Ces déconnexions répétées aux émotions et ce déphasage du parent engendre de la honte. L’enfant en développement recherche le lien et la compréhension. Quand il est confronté à un adulte fermé à ce qu’il vit, il est plus « sécurisant » de se voir défectueux que d’admettre qu’il n’est pas possible de faire confiance à son parent. Pourquoi? L’enfant ne peut se passer de l’adulte. C’est une question de survie.
L’enfant qui a honte, est convaincu qu’il est un nul, un pas bon alors qu’il est simplement lui-même et qu’il exprime un besoin de connexion, un besoin d’être vu pour ce qu’il est. Ce sentiment, l’enfant le traîne longtemps et peut même influencer ses réactions, une fois adulte.
L’enfant a besoin d’attention. « J’ai vu tes pleurs et j’ai vu que tu avais vraiment envie que je t’achète cette trottinette. C’est dur de ne pas avoir ce qu’on veut ». La réaction de l’adulte correspond à ce qu’il vit. Il y a harmonie entre ce qu’il ressent et ce que l’adulte exprime.
Ces interactions empreintes d’attention, permet peu à peu à l’enfant de se percevoir comme un « je », vu et respecté et comme une partie d’un « nous », quelque chose de plus que sa seule individualité, qui n’exige cependant pas qu’il fasse des compromis pour exister ou qu’il perde son sentiment d’être une personne unique.
Ce sentiment d’être compris, l’enfant le garde longtemps. Cela favorise la connaissance de soi et une vie authentique basée sur l’expérience intérieure.
Enfin, prêter attention à son enfant peut amener l’adulte à se questionner. A quel point, je me sens vu, connu et compris dans ma propre vie? Quelles sont les personnes qui me voient vraiment? Prendre conscience de ce qui est bon pour un enfant permet habituellement à l’adulte de réaliser ce qui est bon pour lui.
Attentif, attentionné, faire attention : l’enfant a besoin d’un adulte qui porte ces mots et les fait vivre dans la relation. Aller au-delà des apparences, dépasser le visible et voir ce qui se passe dans le cœur et la tête de son enfant. « On ne voit bien qu’avec le cœur. L’essentiel est invisible pour les yeux » 1
Soyons des « petit prince » pour nos enfants et nos proches!
1) Antoine de Saint-Exupéry, Le petit prince.
*L’acronyme PARC n’est pas mon idée. J’aurais tellement aimé que ça vienne de moi. Mais non, elle est tirée de ce livre :
Siegel, Daniel J. et Payne Bryson, Tina. L’attachement : Comment créer ce lien qui donne confiance à votre enfant pour la vie. Pour plus d’infos : Médiagraphie, section Attachement
Comments